Au cœur de la Bibliothèque d’Étude et du Patrimoine de Toulouse, sous la grande coupole, Raphaël Barontini crée et suspend une œuvre textile monumentale.
Fidèle à ses compositions, l’artiste conçoit une image en patchwork superposant des motifs et des couleurs. Ici, il met en lumière un sujet souvent oublié de l’histoire et des représentations officielles : le conteur créole. Ce personnage a pourtant transmis mille épopées et mythes, préservant ainsi des mémoires ostracisées. L'œuvre, installée au cœur d’une institution dont la collection est riche d’ouvrages datant pour certains du Moyen-Âge, mêle récit historique, fiction et onirisme. Le conteur créole fait lui-même écho à d’autres figures de transmissions orales, du troubadour occitan au griot africain.
Œuvre construite comme un collage mêlé de tissus teints, de pans sérigraphiés et d’impressions textiles digitales, l’installation propose un lien entre les époques, les géographies et les imaginaires. L’artiste aime citer l'écrivain Patrick Chamoiseau : « la parole du conteur, c'est le son de sa gorge, mais aussi sa sueur, les roulades de ses yeux, son ventre, les dessins de ses mains, son odeur, celle de la compagnie, le son du ka (tambour créole de la Guadeloupe) et tous les silences. Il faut y ajouter la nuit autour, la pluie s'il pleut, les vibrations silencieuses du monde. » Solibo magnifique, 1991
Après sa grande installation au Panthéon en 2024, suivant une démarche poétique, généreuse et délicate, Raphaël Barontini affirme de nouveau son audace et sa maîtrise visuelle. En mêlant des inspirations pour interroger nos références, l’artiste nous invite à réfléchir à l’importance de prendre soin des mémoires collectives tout en suscitant l’imagination.
Une production Le Nouveau Printemps.
Ce projet bénéficie du concours du ministère de la Culture, dans le cadre de son programme de soutien à la commande artistique.
En savoir plus
23 Mai au 22 Juin
Commissariat : Yandé Diouf
L’exposition Faire famille puise son inspiration dans le parcours de Kiddy Smile, un chemin d’émancipation qui célèbre la liberté d’être au sein d’un foyer électif. Figure incontournable du voguing et de la culture des ballrooms, Kiddy Smile est l’enfant de ces soirées, refuges pour la communauté LGBTQI+ où chacun.e peut enfin s’affirmer et honorer ses identités plurielles sans crainte de violence. Dans ces événements tant artistiques que politiques, les Maisons, des familles choisies ou créées par nécessité, s’affrontent dans des performances et autres défilés. Dirigées par des « mères », qui guident et soutiennent leurs « enfants », ces Maisons combinent solidarité du collectif et expression individuelle.
L’exposition ne retrace pas l’histoire des ballrooms, mais invoque la puissance de ralliement des Maisons – qui donnent à l’individu·e la force du collectif lui permettant de se monter et de refuser l’ombre à laquelle on l’avait assigné·e - pour nous interroger sur la notion du faire famille. Comment des trajectoires personnelles peuvent-elles converger pour créer un collectif ?
Les œuvres réunies dans Faire famille donnent voix aux récits issus de ce que la norme qualifie de périphéries ou de marges — ces espaces souvent invisibilisés, ignorés ou redoutés, car susceptibles d’ébranler les certitudes ou les privilèges. Pourtant, ces récits sont essentiels : ils constituent une part fondamentale du monde, sans eux, sans ces marges, il serait fatalement fragmentaire et inachevé.
Les artistes choisi.es pour l’exposition explorent et révèlent des liens anciens ou inédits, parfois oubliés, qui relient les individu·e·s à des territoires, à des histoires, à l’Histoire. Ils et elles viennent bouleverser nos repères pour tracer de nouvelles cartographies des identités, des relations, nous invitant à repenser nos individualités dans un cadre commun.
Ainsi, Brandon Gercara comble, par la fiction, les silences de l’histoire kwir (la pensée queer depuis une perspective créole réunionnaise) pour imaginer des récits d’émancipation. Angelica Mesiti explore la performance et la musique comme moteurs du collectif, tandis que Roméo Mivekannin, à travers ses auto-représentations dans l’iconographie occidentale, subvertit les imaginaires imposés aux corps noirs. Ensemble, ces œuvres redéfinissent les corps, les matières, les récits et les sonorités pour ouvrir de nouvelles perspectives aux notions de communauté et d’appartenance, au croisement d’héritages multiples.
L’exposition est une Maison, un espace de réflexion partagée sur nos places et trajectoires, pour imaginer ensemble des stratégies collectives capables de transformer les oppressions et les dénis en forces créatrices et vitales pour faire famille ensemble.
Yandé Diouf
Avec
Malala Andrialavidrazana
Raphaël Barontini
Binta Diaw
Alice Diop, Penda Diouf et Verena Paravel
Brandon Gercara
Laura Henno
Mariana Kostandini
Angelica Mesiti
Marie-Claire Messouma Malambien
Roméo Mivekannin
Yandé Diouf est directrice de projets au Centre Pompidou (Centre Pompidou Malaga, KANAL-Centre Pompidou, Préfiguration du futur pôle francilien de conservation et de création) et possède une riche expérience dans le domaine de l'art et de la culture. Après avoir contribué à l'ouverture de la Fondation Louis Vuitton (programmes artistes et architecture), elle a multiplié les collaborations avec des artistes issus du cinéma, de la musique et des arts plastiques, tant en France qu’à l’international. Sa carrière est marquée par une volonté constante de promouvoir des créations innovantes et de construire des ponts entre les disciplines artistiques et les publics.
En savoir plus
Horaires d'ouverture de la BEP
Mai - juin - septembre
Mardi au samedi de 10h à 19h sf le jeudi 14h-19h
Du 8 juillet au 30/08 : Horaires d'été
Mardi au samedi de 10h à 16h
Fermée les jours fériés
Cette bibliothèque est équipée d'une boucle audio.
L'établissement propose le service Toulouse Guichet, pour les personnes sourdes et malentendantes.